Sud-Ouest vendredi 15 Décembre 2006

Un Théâtre où voyager
"Il faut soit de bons mollets, soit ne être trop pévenant pour les amortisseurs de sa voiture, afin de se rendre sur le nouveau terrain de la compagnie Le Diable Par La Queue. A l’ancienne gare de Mauzens-Miremont (près du Bugue), un petit chemin franchissant un passage à niveau prend rapidement de la hauteur et de la pente pour s’enfoncer dans les bois. Après quelques centaines de mètres cahoteux, au milieu de châtaigniers élancés et de chênes rabougris, d’immenses structures en plastique, des véhicules et des matériels improbables indiquent que la destination est atteinte.
Samedi soir dernier, la serre atelier exhumait une fumée chaude et laissait échapper quelques flonflons, plus communs de l’autre côté de la Méditerrannée.Sitôt la porte franchie, les effluves d’encens, d’épices, de thé à la menthe et de tajines contribuaient à l’ambiance, plantée par d’ondulantes toiles de tissus ocre. Tentes bédouines, salons marocains et étalages divers meublaient l’espace enfumé. Le visiteur devenait acteur de ce souk oriental, greffé sur cette petite colline du Périgord Noir. Les vendeuses de tapis, de poteries ou d’épices entraînaient les acheteurs dans des marchandages dépaysants.
Expérimantal. Mêlés aux visiteurs, Gérard Chabert et Solange Chabert sirotaient un thé à la menthe. "Nous revenons d’un voyage au Maroc en voiture. On a ramené des choses, car on avait l’idée de faire ce souk avant de partir", explique le maître des lieux. Leur prochain voyage hors frontières les maènera en tournée en Belgique et en Autriche. Va-t-on entonner des chants tyroliens en culottes de peau, négocier des pintes de bières sur fond de valses viennoises à leur retour ?
Le sourir du patriarche Chabert n’élude pas la question, tout en marquant une préférence pour une mise en scène de retour d’Inde ou d’Afrique. "On va continuer ce genre d’évènements en essayant de changer à chaque fois. Notre souhait est de créer un nouveau lieu culturel en Dordogne, en gardant notre style. Ce sera à chaque fois un peu expérimental. Nous allons faire des choses qui seraient invendables ailleurs."
Cela promet. D’autant que la propension à créer de Gérard Chabert est tout aussi intarissable que prolixe. Installée depuis un an et demi à Mauzens-Miremont, la compagnie, maintenant propriétaire, a commencé à en raciner ce lieu dans le paysage culturel périgourdain. "Ce lieu est plus central et a du potentiel", explique Gérard Chabert.
Poésie des Chabert. En septembre, "La Trace du Diable", un parcours dans les sentiers environnants, invitait à une balade forestière semée de sculptures et de tableaux vivants, chers à la poésie des Chabert. En Octobre, la compagnie célébrait l’automne avec "Ocre Rouge", une soirée cabaret : un tapis de feuille mortes dans l’atelier accueillait un couple d’amoureux en lacés. Chorégraphie, sculpture géante et repas sur le thème de l’automne achevaient d’aspirer les spectateurs dans l’univers onirique de la compagnie. Cettte prestation, comme le souk oriental du week-end dernier, prenait corps dans l’atelier de la compagnie, où les envolées créatrices de Chabert se matérialisent en sculptures gigantesques. "C’est ici un lieu de travail. Nous avons installé ce marché oriental en une semaine pour un soir. Demain, les machines reviennent. Jusqu’à présent ce n’est pas rentable mais cela nous permet de faire des petites créations extraordinaires. On espère que le pli se prenne." Au départ, les époux Chabert souhaitaient une certaine régularité dans la programmation. "On voulait le faire, mais on est un peu trop fantasque pour y arriver." Le calendrier se pliera donc aux contingences matérielles des tournées et des créations, aux inspirations des Chabert. Le prochain rendez-vous pourrait être donné au début du printemps. Sinon, il faut guetter sur le site : http://www.lediableparlaqueue.com
: Frank Delage

De la roulotte aux yourtes

Au lieu-dit "La Gare" à Mauzens-Miremont, les yourtes résidentielles des époux Chabert déménagées de Saint-Cybranet ont trouvé un nouvel espace depuis un an et demi. "Nous sommes maintenant sédentaires. Les yourtes restent là", tranche Gérard Chabert. Quand la route les a amenés en Dordogne en 1988, les époux Chabert étaient des artistes nomades qui sillonnaient la France depuis cinq ans avec leur roulotte tractée par dix-sept chevaux, leur chapiteau et leurs six enfants, Aglaë, Igor, Thaïs, Sariha, Nana-Cerise et Alizé. Ils présentaient des spectacles de théâtre et marottes auxquels participait toute la famille. La troupe Le Diable Par La Queue était née sur les chemins de traverse. L’envie de Gérard Chabert de s’investir d’avantage dans la création de spectacles ou d’oeuvres plastiques artistiques pousse la troupe à faire un premier pas dans la sédentarisation. Alors qu’ils se trouvent au Bugues, il fabrique une gabarre pour la mairie et participe à la réalisation de la félibrée. Le départ des plus grands enfants et la multiplication des créations attachent de plus en plus la troupe au Périgord. Elle installe alors son village d’inspiration mongol à Saint-Cybranet. Ironie du sort, l’univers onirique et esthétique des Chabert est sûrement plus connu à l’extérieur du département avec des tournées nationales et internationales. Mauzens-Miremont devrait réparer cette injustice. Le Diable Par La Queue travaille actuellemtn sur une création "Fâme", qui sera présentée le 8 Mars 2007 au Centre Culturel de Sarlat.

Sud-Ouest samedi 3 Mars 2007

Théâtre. La compagnie du Diable Par La Queue, des époux Chabert, est en résidence au Centre culturel. Elle présentera, jeudi soir, sa création"Fâme".


Le démon et la femme
Ne cherchez pas dans le dictionnaire. "Fâme" est une contraction de femme et âme. "C’est un spectacle sur la femme, le complément direct de l’homme, ma vision personnelle de la femme", explique tout en douceur Gérard Chabert, le mentor de la troupe de théâtre Le Diable Par La Queue, scénariste, metteur en scène et concepteur des décors. L’homme n’est pas bavard. Il ne parle pas, il agit. Gérard Chabert s’exprime dans ses spectacles. Ses créations valent d’ailleurs bien plus long discours.
Toutefois, une petite étincelle brille dans ses yeux et un sourire se dessine discrètement sous sa barbe poivre et sel fournie. Il poursuit : "C’est un message esthétique, de bonheur de vivre avec les femmes". C’est sûr, il y a de l’esthétisme dans les spectacles de la compagnie Le Diable Par La Queue. Le tout avec une dose de poésie. Depuis lundi, les huit acteurs et techniciens de la troupe ont investi le Centre culturel pour mettre les touches finales à cette création, leur première ici.
L’idée a germé dans la tête du directeur du Centre Didier Pignon lors du Festival des arts en folie et d’une petite contribution de la troupe. Le Diable Par La Queue est plus habitué des grands espaces à ciel ouvert, des prestations de rue. Cette incursion dans une salle ne pourra que bonifier le résultat final avec l’appui des techniciens locaux, sans oublier la lumière si chère à Chabert. Mais il n’était pas question de rompre avec son univers.
Oeuvres plastiques gigantesques. Ce sera vraiment du Diable Par La Queue, avec des oeuvres plastiques gigantesques, des comédiens très légèrement vêtus et une musique originale de Christine Payne. Le Centre culturel s’est vidé de ses sièges. Le vaste plateau accueillera le public qui déambulera au milieu du décor, papillonnant d’une saynète à une autre, guidé par les lumières qui s’allumeront tour à tour. "Gérard conçoit ses spectacles comme un peintre, un sculpteur", résume son épouse Solange. Les décors déjà en place laissent envisager l’ambiance qui va régner pour la représentation de jeudi prochain. Une femme gigantesque, nue et couchée, atteint les 4 mètres par 7,5 sous la toise. Elle s’appelle la "Femme sculpture". La "Mère Terre" lui fait face. Une Vénus préhistorique assise sur un globe transparent est également présente. Puis on trouve une chrysalide géante ou la "Fleur aux amoureux" inspirée du jardin des délices de Jérôme Bosch. "C’est le côté rêveris que l’on a développé, poursuit Solange Chabert. Comment le spectaculaire peut se laisser emporter par l’imagination. On présente des images et il va y avoir des surprises". Sur ce thème de la femme, les différents tableaux évoqueront des naissances et renaissances d’humains, d’humanité, de monde.
: Franck Delage

Sud-Ouest jeudi 8 Mars 2007

SPECTACLE. Pour la journée internationale de la femme, la troupe Le Diable Par La Queue présente "Fâme", ce soir au Centre culturel de Sarlat. Une création qui décline la féminité en différents thèmes.

Diablement poétique
Depuis plus de vingt ans, la troupe périgourdine Le Diable Par La Queue secoue notre imaginaire, joue avec nos cordes sensibles, titille notre âme de poète. Avec sa dernière création, l’imagier onirique Gérard Chabert embrasse avec tendresse la femme.
"Fâme", contraction de femme et âme, est une compilation d’instants d’éternité, de l’origine de l’humanité aux émotions glanées dans l’univers chimérique de ce plasticien. "J’ai eu envie de présenter l’univers de la femme tel que je peux le ressentir à travers les émotions qui ont été les miennes, souvent par le biais de révélations artistiques, mais aussi parfois par les heures de bonheur de la vie", décrit Gérard Chabert, scénariste, metteur en scène et créateur des décors et des costumes de "Fâme".
Inspiré de Courbet. C’est la première fois que cette troupe d’artiste de rue installée à Mauzens-Miremont investit le Centre culturel de Sarlat pour donner libre cours à son imagination. Sa création fidèle à l’univers esthétique de Gérard Chabert tire partie de la structure avec un savent jeu de lumières et une bande-son originale léchée de Christine Payne. Dès l’insolite pénétration du public dans la salle baignée d’une pénombre aux senteurs d’encens, l’immersion est immédiate parmi les éléments de décors du plasticien fécond : une femme sculpture géante, couchée et nue, inspirée de "L’Origine du monde " de Courbet, une colossale Venus préhistorique, une fleur aux amoureux sortie du "Jardin des délices" de Jérômes Bosch…
Le troupe rompue aux prestations à ciel ouvert ne pouvait se résoudre à faire asseoir son public et propose un agencement transformant la salle en scène.
Langueur voluptueuse. Le spectateur déambule de saynète en saynète, guidé par la lumière. Dans une langueur voluptueuse, les cinq acteurs déclinent avec poésie et grâce des allégories et métaphores sur la naissance, la féminité, l’amour, la libération de la femme. Dans la droite lignée de "In Vitro", "Sculptures de Corps" ou "Nativité", les acteurs nus et badigeonnés de blanc offrent leur corps à la science atypique de Chabert.
Tout le génie plastique et la machinerie de celui-ci se mettent en branle au service de la femme : "Je fréquente assidûment depuis ma plus tendre enfance une partie de l’autre moitié de l’humanité et toujours j’entends entre les élans d’amour ces mêmes disours de revendication, déception, inconpréhension, reproche, appréhension… A travers ce spectacle j’émets l’idée que je me fais du sujet." Attention, le nombre de places est limité à 300 spectateurs.
: Franck Delage

Ancinenne presse